Cueva La Araa

Fleurs, abeilles sauvages et domestiques,
bourdons et araignées

Dans l'Yonne, comme partout, les abeilles, comme les fleurs, peuvent être sauvages... ou le redevenir, même si la domestication des abeilles existe depuis la nuit des temps, pas uniquement pour le miel, mais aussi pour la cire et pour l'hydromel (sans doute une des premières boissons fermentées bues dès l'époque préhistorique).

Butinage de Datura stramonium le matin


Dans l'Aube - 9 septembre 2020 vers 10:00

Les abeilles sauvages

La majorité des abeilles sauvages, dont les halictes, Halictus scabiosae (Rossi, 1790) par exemple, et les osmies, vivent au sol mais également dans des cavités ou dans les branches et les brindilles creuses des roseaux, dans les branches tendres des sureaux ou des ronces. Depuis des centaines de milliers d'années même les abeilles mellifères affectionnent les arbres creux pour fonder leurs colonies.

Solitaires ou formant des nids, elles n'ont pas d'ouvrières et ne fabriquent donc pas de miel.

Comme toutes les abeilles, et contrairement aux papillons, elles ont la particularité de ne pas transporter le pollen bien loin et de faciliter les rapports de voisinage proche entre fleurs.

En France on trouve six familles d'abeilles mais seuls quelques très rares membres de la famille des Apidae (s.l.) sont dits eusociaux  : les abeilles domestiques et les bourdons (du genre Bombus qu'il ne faut pas confondre avec les faux-bourdons).

Les bourdons

Les bourdons se différencient des abeilles tant par leur comportement que par leur écologie, comme par exemple celui, ci-dessous, sur une fleur de Carlina vulgaris dont les graines ne risquent certainement pas d'être enrobées par des pesticides comme peuvent l'être certaines semences.


Bourdon et Carlina vulgaris
Précy-le-Sec, 14 août 2010

Quand les abeilles restent encore au chaud dans leurs ruches car la température extérieure est trop basse (elles ne sortiraient pas à moins de 12°C), les bourdons sauvages, protégés par leur épaisse fourrure, peuvent polliniser certaines espèces de fleurs précoces dès le tout début du Printemps. Mais, ci-dessous, c'est au mois d'août et dès juin que ces bourdons visitaient les fleurs.

Les bourdons ont la particularité d'avoir une paire de mandibules qui parfois leur permet de déchirer les corolles de certaines fleurs si leur trompe (dont la longueur varie selon les espèces) ne leur permet pas d'atteindre le nectar, ces fleurs ainsi perforées risquant d'être stériles.

 Le vol du bourdon - Rimsky-Korsakov


Bourdon et Centaurea scabiosa
Lucy-sur-Cure, 17 juin 2011


Bourdon et Echium vulgare
Sermizelles, 21 juin 2011

Les abeilles domestiques

Domestiques et vivant en ruches les abeilles du genre Apis ne représentent donc que quelques espèces sociales parmi des milliers d'autres qui sont solitaires ou semi-sociales comme, par exemple, l'abeille charpentière, du genre Xylocopa. Les abeilles du genre Apis comptent parmi elles des ouvrières polyvalentes qui deviennent butineuses (et donc pollinisatrices) une vingtaine de jours après leur naissance et jusqu'à la cinquième ou sixième semaine de leur vie, c'est-à-dire jusqu'à leur mort.

Elles parcourent la campagne fleurie, en voyant plus loin que nous dans l'ultraviolet, afin de trouver : nectar, pollen, miellat, propolis, eau, et de pouvoir sécréter la gelée royale, une substance gélatineuse et blanchâtre aux reflets nacrés émanant de leurs glandes hypopharyngiennes et mandibulaires. Elles fourniront ce mélange d’eau, de protéines (dont une protéine nommée royalactine), de sucres, de lipides, de vitamines, d’antibiotiques et de sels minéraux à toutes les larves de la colonie dès leur éclosion, mais seulement durant trois jours pour les ouvrières et cinq jours pour les futures reines, la reine de la colonie s’en nourrissant toute sa vie à partir du moment où elle quitte la cellule royale, une fois son stade adulte atteint, ce qui lui permettra de vivre 20 fois plus longtemps que les ouvrières.

Les abeilles vivant en ruches sont des animaux domestiques et comme tels, elles ont été sélectionnées. Le sélectionneur le plus célèbre du monde apicole s'avère être un moine allemand nommé Karl Kehrle (1898-1996) ayant vécu à l’abbaye de Buckfast, dans le sud de l’Angleterre, connu comme étant frère Adam. Il a parcouru le monde pour rapporter des reines dont les caractéristiques étaient intéressantes. En les croisant avec ses souches d’élevage, il a créé une abeille nommée désormais Buckfast, résistante et actuellement très répandue.

Qui dit abeilles dit également :

  • NECTAR

    Matière première du miel, le nectar est secrété par certaines plantes qui possèdent des glandes appelées nectaires.
    Le nectar attire les insectes et les papillons pour favoriser la pollinisation des plantes qui le produisent.
    C'est par succion, gràce à leur langue (un proboscis) que les abeilles collectent le nectar qu'elles transportent ensuite dans leur jabot où il il se transforme déjà grâce à une enzyme, l'invertase.

  • POLLEN

     Le pollen, poudre de vie

    Constituant l'élément fécondant mâle de la fleur, le pollen est initialement contenu dans l'anthère à l'extrémité des étamines et, en dehors des cas d'autofécondation, quand ce n'est pas le vent, ce sont les insectes dits pollinisateurs, parmi lesquels les abeilles, qui déposent sur le stigmate d'une fleur femelle le pollen qui s'était accroché à leur corps et qu'elles brossent grâce à leurs pattes postérieures munies de poils courts. Mais elles gardent précieusement dans leurs deux corbicules (ces petites corbeilles accrochées à la face externe de leurs pattes arrières) celui qu'elles ont ramassé grâce à leurs pattes médianes qui possèdent une épine servant au décrochage des deux petites pelotes de 6 mg de pollen (leur seule source de protéines) qui leur permettra de nourrir les larves et la reine qui, comme l'écrit Jacques Testart, "n'est pas pourvue d'un génome royal, mais dérive d'une vulgaire larve ouvrière qui, nourrie comme une aristocrate, deviendra 5 fois plus grande, vivra 50 fois plus longtemps, et se comportera en pondeuse paresseuse et chouchoutée", sa nourriture d'aristocrate étant en fait la gelée royale.

  • MIELLAT

    Un liquide sucré plus ou moins visqueux excrété par divers insectes suceurs de sève que les abeilles trouveront sur certains arbres.

  • PROPOLIS

    Une substance résineuse essentielle pour les abeilles qui l'extraient des bourgeons et de l'écorce de certains arbres et que des enzymes de leur système digestif modifient en un mélange complexe, de couleur brun jaune et d'odeur balsamique, ayant des propriétés tinctoriales, antifongiques et antibactériennes. Elles s'en servent d'ailleurs pour imprégner les cadavres des prédateurs qu'elles ne peuvent pas toujours éliminer de leurs ruches.

  • EAU



    Celle des gouttes de pluie et de rosée, des flaques, bassins... mais aussi celle des gouttelettes de guttation des feuilles de plantes.
    Mais lorsque les racines ont absorbé des substances toxiques, ces gouttelettes peuvent être dangereuses pour les abeilles pourvoyeuses d'eau (pouvant transporter jusqu'à 25 mg d'eau ou plus par voyage, après remplissage de leur jabot puisque leurs pièces buccales, adaptées au léchage et à la succion, permettent l’aspiration) et pour d'autres pollinisateurs.

C'est ainsi que les ouvrières nourriront reine, larves et faux-bourdons, tout en permettant à leurs semblables, encore trop jeunes pour s'envoler, de réparer la ruche avec la propolis.

Les faux-bourdons, eux, ventilent peut-être un peu la ruche mais ne peuvent pas butiner en raison de leur anatomie (leur langue est trop courte).
Ces faux-bourdons ont plusieurs particularités : nés par parthénogénèse, c'est-à-dire d'ovocytes non fécondés, leurs oeufs ont été déposés par la reine dans des alvéoles plus grandes que les autres. Ils ne sont qu'une centaine dans une ruche, alors que les ouvrières se comptent par dizaines de milliers, et leur présence n'y est qu'estivale. Leur fonction principale sera de féconder une reine autre que celle de leur colonie et pour ce faire ils se regroupent en "congrégation" avec des milliers de mâles issus de colonies différentes et ne retournent dans leur ruche que pour se nourrir. Ceux qui se seront accouplés perdront leur organe reproducteur et mourront, tandis que les autres finiront par ne plus être nourris par les ouvrières qui les expulseront, mourants et sans défense, à l'automne.

Le saviez-vous ?

 La danse des abeilles - Les Enfantastiques

  • Les abeilles communiquent avec des signaux chimiques : les phéromones. Les reines ont les leurs qui se comptent par dizaines, et les ouvrières en ont d'autres, notamment l’Oléate d’Ethyle (EO) qui permet d’optimiser l’équilibre nourrices / butineuses dans la colonie. Cette phéromone est contenue dans leur "jabot social" qui leur permet un mode de transfert de nourriture nommé trophollaxie.
  • La couleur violette paraît bleue aux abeilles qui voient par contre le jaune, et le rouge de certaines fleurs leur apparaît blanc en raison d'une forte réflexion de l'ultraviolet.
  • L'abeille possède 16 chromosomes, la longueur de son génome aurait environ 236 millions de paires de base et 700 de ses gènes seraient communs aux nématodes et aux mammifères.


Si vous aimez le miel et le pain d'épices, les cerises, les pommes et les poires, ne traitez pas les fleurs sauvages comme des "mauvaises herbes" ! Vous aussi, pensez aux abeilles, "laissez pousser les jachères".


Les fleurs sauvages

Ci-dessous quelques fleurs sauvages icaunaises butinées par les abeilles et d'autres insectes pollinisateurs... des fleurs qui "apprécient" ces insectes pour leur aide dans ce passage des grains de pollen (que l'on nomme pollinisation) depuis leurs étamines vers les stigmates des autres fleurs de leur espèce qui se retrouvent alors fécondées.

Comme ici la Zygène des Bois
butinant Knautia arvensis


Anchusa italica Retz
Buglosse d'Italie, buglosse azurée
Borago officinalis L.
Bourrache officinale
Calluna vulgaris L.
Callune fausse-bruyère
Cichorium intybus L.
Chicorée sauvage
Crataegus monogyna Jacq.
Aubépine un style
Cyanus segetum L.
Bleuet, bluet des champs, casse lunettes
Epilobium angustifolium L.
Laurier de St Antoine, osier fleuri
Erica cinerea L.
Bruyère cendrée
Hedera helix L.
Lierre
et son abeille, Colletes hederae
Laburnum anagyroides Medik.
Aubour, cytise Aubour, faux Ébénier,
cytise grappes
Lycopsis arvensis (L.) M.Bieb.
Lycopside des champs
Melittis melissophylum L.
Mélitte feuilles de mlisse
Mentha pulegium L.
Menthe pouliot
Papaver rhoeas L.
Coquelicot
Phacelia tanacetifolia Benth.
Phacélie à feuilles de tanaisie
Robinia pseudoacacia L.
Robinier faux acacia
Salix caprea L.
Saule marsault
Vous pourriez le voir, au tout début du printemps, dans le marais du
Moulin de Vanneau

Sinapis arvensis L.
Sénevé, moutarde des champs, ravenelle
Tussilago farfara L.
Pas-d'âne
Vaccinium myrtillus L.
Airelle myrtille
et tant d'autres encore...

Chaque fleur possède son parfum et, si elle est riche en nectar, les abeilles la reconnaîtront aisément, grâce à leurs facultés sensorielles, parmi les centaines d'autres qui se comptent en France, d'autant plus que leur vision les aidera également car les abeilles ont des yeux tellement différents des nôtres qu'une fleur qui nous paraît uniformément rougeâtre est pour elles colorée avec une multitude de nuances.

La naissance des osmies au mois de mars dans l'Yonne




Les araignées

Les insectes pollinisateurs que sont les abeilles, ces Hexapodes, ont une agonie bruyante lorsqu'ils sont "emmaillotés" par un autre Arthropode comme Pholcus phalangioides (Fuesslin, 1775), tellement différent d'eux comme tous les membres des Chelicerata tel qu'un Arachnide comme l'araignée.

 

 Le Festin de l'araignée, ballet pantomime d'Albert Roussel


Pholcus phalangioides (Fuesslin, 1775)

Un Arthropode comme l'araignée, avec son corps segmenté en deux parties : céphalothorax et abdomen, et ses 8 pattes fixées au céphalothorax qui présente également chélicères et pédipalpes, n'est donc pas un insecte comme l'abeille puisqu'elle a un corps présentant trois parties et 6 pattes. Les yeux, sans facettes, que parfois n'a pas du tout l'araignée selon l'espèce à laquelle elle appartient, sont dits simples et sont en général 8, mais parfois 6 ou 4, alignés sur une ou plusieurs rangées.

Et elle penserait avec sa toile qui serait en fait une partie… de son cerveau !

 À voir : une araignée tissant sa toile

D'où désormais la possible utilisation des araignées orbitèles construisant leurs toiles géométriques comme modèles comportementaux innovants pour l’étude du vieillissement.
Mais ce n'est pas tout.
Si les toiles d'araignées capturent l'ADN environnemental de vertébrés terrestres, toutes les araignées ne fabriquent pas des toiles, notamment :

  • celles appartenant aux Scytodidae, la famille des araignées dites "cracheuses", comme Scytodes thoracica (Latreille, 1802) ci-dessous.

Scytodes thoracica, Champigny-sur-Yonne, 6 avril 2024 - Photo © Jean YGNARD

 À voir : Le regard de l'araignée


Panneau vu au Jardin Atlantique, Paris XIVe - 3 avril 2024

Un rectangle de béton au dessus de la Gare Montparnasse égalera-t-il un jour une vraie prairie ?

 À voir : C'est pas sorcier. Araignées

Pour en savoir plus

Une étude archéologique révèle les secrets de fabrication des apiculteurs étrusques.

Bibliographie
  • Jacques GOÛT
    Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les abeilles,
    Guide visuel à destination des esprits curieux et pressés
    © Agence Media et Hatier, Paris, 2012.

  • François LASSERRE - Illustrations : Jérôme Gremaud
    Comme on ne l'a jamais lu... L'abeille,
    Collection dirigée par Sylvie Baussier
    © Delachaux et Niestlé | Jeunesse, Paris, 2010.

  

À écouter


 On ne prête qu'aux ruches


 L'abeille, une guêpe devenue végétarienneQui sont les abeilles sauvages ? La stratégie du coucou chez les abeilles sauvages Quel avenir pour les abeilles ?